|
| |
|
|
|
Lundi
3 février 2004 |
| Chronique
d'un départ annoncé. | |
Cela fait trois jours déjà, qu'on nous le ressasse, qu'on nous le martèle, qu'on
nous le trépane, qu'on nous l'occipute qu'on nous le "désazimute", qu'on nous
le désassimile, qu'on nous le "vas-y Mimmile", bref, qu'on nous le sympathise,
qu'on nous le Johnny-Juppé reviens, qu'on nous prévient, qu'on nous retient notre
attention, qu'on nous dit attention, attention à quoi, bon dieu, (pardon m'sieur
Dieu) qu'on nous dit que Juppé va vous nous manquer et qu'il faut pas qu'on soit
en manque, qu'un seul Juppé vous manque… |
Et même les saints qui s'en mêlent et qui s'emmêlent avec les pas sains et avec
les saintes nitouche, et même Bernadette qui s'en mêle, elle on peut pas dire
que ce soit une sainte, Sainte Bernadette, vous imaginez, en plus, elle n'y va
plus Bernadette dans l'arène ces derniers temps, elle reste plutôt douillette,
au tapis, enfin au tatami, et bien même Bernadette ces temps-ci, qu'elle est plutôt
douillette et pièces jaunes, elle s'en mêle et la voilà qui les lâche ses pièces
jaunes et le gros Douillet (lui il est vraiment Douillet) mais c'est pas de sa
faute c'est son nom, non, c'est pas un surnom, non, c'est pas un sumo non plus,
non, c'est pas un sumo, c'est promis, c'est pas un sumo, même Sarkosy l'a pas
dit, d'ailleurs il a pas les cheveux gominés et c'est un Intellectuel qui fait
du judo, ça peut pas être un sumo, donc même Bernadette, que c'est pas une sainte
et que c'est plutôt une douillette, voila trois jours qu'elle est sortie de sa
couette et qu'elle l'a laissé en plan l'autre gros avec son kimono et ses kilos
de pièces jaunes, pour nous jouer la Ma Dalton, la chef de clan par procuration,
ça fait trois jours qu'elle se voue en litanies pour nous rappeler qu'un seul
Juppé vous manque et que l'UMjuPé est dépeuplée, et c'est la voie du peuple qui
nous le dit quand c'est Bernadette qui parle puisque Bernadette, c'est une élue… |
Et
puis, en même temps, d'un autre côté, il y a le concert des autres, avec d'autres
sirènes qui sifflent sur nos têtes, en même temps que les premières. C'est dangereux,
les croisements de sirènes, surtout à un carrefour, surtout à un carrefour en
développement. | Bref
il y a les autres sirènes qui nous disent : vous allez voir ce que vous allez
voir, que le Juppé ni une ni deux il va se la faire la malle, qu'il va se la goûter
sa tentation de Venise, et que même les langues de vipères ne vitupèrent plus
depuis trois jours sauf Montebourg, mais c'est pas une langue de vipère, donc
ça compte pas, ça rentre pas dans les quotas, il paraît qu'il y a des quotas de
vipères, comme il y a des quotas de Lang, question de culture, tout ça, mais ça
ne rentre pas non plus dans les sondages, donc ça ne compte pas. |
Non,
cette fois, ce qui compte, on nous le dit et on nous le répète, c'est que le Juppé,
avec ou sans jupette, il ne va pas se la garder sa veste, il en a marre de se
la prendre. Cette fois, c'est promis, il ne va pas se l'avaler sa couleuvre, tant
pis pour la pomme, la grosse pomme, lui, l'Alain, s'il l'est plus, éligible, c'est
sûr, il l'a dit, il l'a promis, droit comme un I, droit commun oblige, pas forcément
si fier que ça dans ses bottes, il n'aura plus qu'une seule ambition: "qu'on les
lui lâche, les bottes"… | D'ailleurs
il n'a pas tant que ça l'ambition du pouvoir, il l'a dit, ça aussi et il l'a redit.
Il a une vie ailleurs, une vraie vie, d'ailleurs, d'ailleurs c'est un poète, Juppé,
la maison UMP ne voulait-il pas l'appeler la Maison bleue ? |
Finalement,
il gagne à être connu cet homme. Il nous est presque devenu sympathique en trois
jours. | La
maison bleue. | C'est
qu'il est champêtre et forestier en diable, notre Juppé, même si c'est plutôt
le côté garde champêtre qu'il assume à l'UMP, quoique garde champêtre quand on
y réfléchit, c'est pas mal, c'est même finalement plus écolo que garde-barrière
et ça le fait moins que gardien de prison… | Et
puis tout le monde ne peut pas être Sarcogarde. Un garde champêtre, ça laisse
paître les vaches, ça doit être pour ça qu'il a finalement choisi d'appeler son
groupe l'UMP. | Et
lui, Juppé, qui est un être humain comme les autres, un homme quoi, avec un cœur
qui bat, comme tout le monde, ce qu'il désire ardemment, dorénavant, c'est l'évasion…
si l'on ose dire. | Enfin,
tout ça, c'est ce qu'on nous laisse entendre… | On
nous assure, on nous jure presque, que s'il est inéligible, le Juju, il les envoie
tous se faire paître, les grosses vaches et qu'il se met aussitôt au régime vaches
maigres et à l'eau. | Il
ne souhaite plus qu'une chose, désormais, Juppé, qu'on la lui foute la paix. Un
pur jus paix, sur une gondole, à Venise. Voilà son avenir. |
Et
alors ? | Et
bien, rien … | Trois
jours. | Trois
jours c'est vrai c'est rien dans la vie d'un homme, même s'il y a des jours plus
lourds que d'autres. | Trois
jours, d'un suspense insoutenable avec une peur au ventre durant tout le week-end
qui ont fait que même l'appel de l'abbé Pierre, pourtant il y a encore peu numéro
un au hit parade des français et qui était revenu pour fêter les cinquante ans
de son appel, je ne sais pas si vous avez remarqué, mais ils reviennent tous fêter
leurs cinquante ou leurs soixante ans cette année, les ex numéro un des hits parade
des français, sauf Douillet, bien sûr, c'est normal, il peut pas, il est encore
beaucoup trop jaune (non, je vous assure, j'ai pas dit que c'était un sumo), et
bien même l'appel de l'abbé Pierre, qui certes n'est pas un saint, mais enfin,
quand même, à côté de Bernadette, je sais pas moi, imaginez, un jour, si jamais
ils étaient canonisés les uns et les autres, je suis quasiment sûr que saint Pierre
serait quand même le premier au hit parade, même devant sainte Bernadette, quoique,
comme on dirait du côté de Saint Denis, j'en mettrais pas ma tête à couper (on
doit pas vraiment dire ça du côté de Saint Denis) mais c'était une digression,
on n'en parle plus, on se la met sous son bras ou dans sa poche, sa Langue de
vipère, avec sa tête par-dessus, on quitte l'Evangile, les saints et les bergers
et on en revient à nos moutons, sur les bords de la Seine, on revient à quai,
puisque c'est sur les quais de Seine qu'il habite pour l'instant, Juppé, à défaut
d'habiter sur la Lagune. | Trois
jours donc, d'un suspense insoutenable où même l'appel de l'abbé Pierre qui était
revenu re-crier, 50 ans après son "famine je vous hais", même cet appel là, est
passé quasi inaperçu à côté de l'appel… du seul appel qui comptait, la procédure
d'appel d'Alain Juppé. |
Au point même
que toutes les bonnes feuilles du week-end n'ont titré que sur la procédure d'appel
Juppé. | Oui,
on peut le dire, sans rire, ce week-end, les feuilles se sont ramassées à l'appel.
| Et
les feuilles de vote, un week-end prochain, comment qu'elles vont se ramasser,
elles ? | Mais
là, je m'éloigne trop du quai, je quitte les berges, je gamberge, je divague…
| Restons
en à la seule humeur d'un jour. | |
Paris,
le 3 février 2004. | |
Patrick
Blanchard | |
|